La méditation est à la mode en Occident. Qu'en pensez-vous ?
«En se démocratisant, le bouddhisme s'est aseptisé. En Occident, il est souvent associé à une thérapie, et non plus à une spiritualité. Ce qui est une hérésie pour les Asiatiques. Cela dit, la méditation présente de nombreux aspects et permet d'acquérir une meilleure connaissance de soi, qui aide à aller mieux, à être moins stressé et moins angoissé.»
Quel est le sens de la vie, selon vous ?
«D'un point de vue bouddhiste, la vie n'a ni sens ni objectif. Je sais bien que cette réponse, abrupte, risque de choquer vos lecteurs, mais, pour moi, elle est évidente et pragmatique. Elle prend en compte la réalité de l'impermanence, le fait que rien n'existe en soi, que rien ne dure, que tout change sans cesse. L'accepter m'autorise à me montrer lucide et m'empêche d'adhérer, une fois pour toutes, à des concepts et à des idées préconçues. Si nous considérons que nous naissons pour suivre des objectifs précis, nous sommes emprisonnés dans des schémas, des directions. C'est contraignant, sclérosant. Il est préférable de créer les buts que nous nous fixons au fur et à mesure que nous évoluons. Nous possédons tous la liberté de le faire. Le savoir nous encourage à devenir autonomes, à nous déconditionner de notre éducation, de nos peurs, de nos habitudes. Cela demande du courage, de faire preuve de discernement et de patience. Mais procéder ainsi, c'est vivre en cohérence avec la loi de l'impermanence. Tout bouge constamment. Le sens que nous donnons aux choses aussi.»
Votre définition du bonheur ?
«Nous courons tous après, mais c'est quelque chose qui demeure très mystérieux à mes yeux. Trop souvent, notre conception de ce que nous nommons, communément, le bonheur dépend de nos états mentaux, et de nos conditions extérieures et intérieures. Le bonheur authentique naît et réside dans notre esprit. C'est un sentiment de contentement, de plénitude, qui se découvre en questionnant sans cesse, avec enthousiasme et curiosité, ce que nous expérimentons. La plupart des gens ne sont pas heureux, car ils veulent posséder le bonheur, alors qu'il ne se consomme pas. Découvrir sa saveur suppose de faire preuve de persévérance, de discipline, de vigilance, de développer la conscience du moment présent, et de connaître la loi de cause à effet. Ce n'est qu'ainsi que, peu à peu, cet état de sérénité et de paix intérieure que l'on nomme bonheur devient stable. Nous sommes responsables du monde dans lequel nous vivons.»
Le titre de votre livre : Bouddha rebelle est provocant. Sommes-nous tous des bouddhas rebelles en puissance ?
«Oui. Le Bouddha nous a enseigné il y a plus de 2 500 ans à remettre en question nos croyances. Cette forme de révolution intérieure, dirigée contre nos pensées et nos émotions, est destinée à nous permettre de découvrir qui nous sommes vraiment. Ce qui implique de prendre le risque de mieux se connaître, de laisser tomber les masques sociaux qui nous déterminent et nous spécifient. Le message essentiel du Bouddha rebelle est pour moi : comment devenir un être humain libre et responsable ? Cette exploration de la réalité, vers la liberté, est passionnante et amusante. C'est un voyage plein de surprises. Quand on avance, une sensation d'espace, de joie tranquille et d'ouverture grandit et s'épanouit en nous. Ce cheminement reste sans aucun doute l'une des dernières grandes aventures de notre époque.»